par Xavier F5NTZ.
Le Radio club F6KOP organise tous les ans, au moins une expédition radio. Cette année, c’est le Bénin qui a été choisi parmi plusieurs destinations étudiées. Le choix s’est fait sur plusieurs critères. L’intérêt du pays pour la communauté radioamateur que l’on peut étudier en consultant notamment les listes des Mosts Wanted, le coût de l‘expédition, les dates possibles et évidemment la possibilité d’obtenir une licence temporaire de trafic pour les opérateurs. Pour certains pays, la licence est très compliquée, voire totalement impossible à avoir. L’hébergement est aussi primordial ainsi que la facilité d’accès et de transport depuis l’aéroport, la possibilité d’accueillir autant de personnes, de poser des antennes sur une grande surface, d’avoir des horaires de repas aménagées (en 2 groupes),…
Autour de Jean-Luc F1ULQ, leader de l’expédition, l’équipe se compose de Damien F4AZF, co-leader, Jo DJ3CQ, Arno DL1CW, Christian DL2MDU, Andreas DL3GA, Henri F1HRE, Raymond F5MFV, Philipp OE7PGI et Xavier F5NTZ.
L’équipe TY7C
Cette année c’est donc le Bénin qui est choisi, l’indicatif TY7C est demandé. Il est dans la « lignée » des indicatifs des expéditions précédentes de F6KOP. Nicolas, TY2AC est résident au Bénin et membre de F6KOP. Il sera d’une grande efficacité pour l’obtention des autorisations officielles. Celles-ci, malgré sa présence à Cotonou et les démarches qu’il a entrepris en se rendant personnellement dans les différents ministères et administrations, ont été difficiles à obtenir. L’indicatif sera accepté et officiel quelques jours seulement avant notre départ. Damien s’est occupé du « dossier technique » pour l’administration béninoise, Jean-Luc des sponsors, de la partie informatique et des logs.
F1ULQ et F4AZF devant les Pelicases comprenant le matériel radio
Une expédition c’est aussi énormément de préparation. Durant les semaines qui ont précédé notre départ, tout le matériel a été testé au radioclub. Tout a été très soigneusement ficelé, rangé, emballé. Les membres de F6KOP présents lors des weekends précédents l’expédition, ont effectué un travail de fourmi afin que lors du déballage au Bénin, rien ne manque, tout fonctionne, tout soit facile à trouver et tout soit facile à monter. TY7C, ce n’est pas seulement dix OM qui partent en expédition, c’est aussi tout un club qui se mobilise ainsi qu’un ensemble de sponsors, clubs, entreprises et particuliers, qui rend l’aventure possible. Des opérateurs venant de toute l’Europe, pour partir en expédition, sans l’aide logistique des « KOPains », cela serait impossible.
Derrière les palmiers, le shack
Damien, F4AZF a préparé des antennes VDA pour différentes bandes. Ces antennes, très simples de conception et donc de montage, puisque qu’elles se composent uniquement de tubes de PVC scotchés entre eux, de fils électriques et d’un balun, se sont révélées particulièrement bien adaptées aux conditions de trafic de l’expédition. Elles sont faciles à monter, robustes et très efficaces. Des antennes verticales ont aussi été emportées, notamment pour le 160 et le 80 mètre. Celles-ci ont fait leurs preuves lors les précédentes expéditions.
Le montage des antennes
L’aventure commence le jeudi 8 mars après un vol de nuit vers Cotonou sans histoire, si ce n’est un retard de deux heures. Après une courte nuit qui sera d’ailleurs très pluvieuse et pleine d’éclairs, nous nous retrouvons au petit matin, sous un splendide soleil qui semble tout ignorer de la nuit orageuse. Nous attaquons l’assemblage des VDA, c’est une découverte pour certains d’entre nous. La rusticité de ces antennes nous interpelle, mais elles se révéleront très efficaces. Nous devrons toutefois les régler de nouveau car le plan de sol n’est pas le même qu’en métropole. Nous passons la journée entière à les monter sous le soleil caniculaire. Il n’est pas possible de rester trop longtemps au soleil sans de nombreuses petites pauses désaltérantes. L’humidité est suffocante pour nous qui venons d’une zone fraîche et sèche. Nous disposons d’un grand terrain sans trop de passage mais rempli de Bernard L’Hermite, au bord de la mangrove, à quelques dizaines de mètres de notre shack. C’est optimal ! Les palmiers serviront de points d’ancrage pour certains haubans.
Malgré notre envie de finir le montage et notre impatience à allumer les émetteurs pour commencer le trafic, nous avons du mal à travailler rapidement. Il fait très chaud, entre 35 et 40°C à l’ombre et bien sûr, nous sommes en plein soleil. Au soir venu, nous n’avons pas fini le montage de toutes les antennes. Mais nous avons tout de même érigé celles nécessaires pour la soirée et pour la nuit. Seules restent les antennes 10 et 12m à monter. Nous verrons le jour suivant, pour ces autres bandes, qui ne fonctionnent pas de toute façon la nuit.
F1ULQ, F4AZF, DL1CW et DL2MDU AU SHACK
Dans le même temps, le shack a aussi été organisé dans une des salles de réception de l’hôtel. Cette pièce est équipée de deux climatiseurs devant lesquels nous viendrons chacun nous « prosterner » de temps à autre tant il fait chaud dehors. Nous avons emporté quatre émetteurs, des Kenwood TS 590 ainsi que des amplificateurs Acom. Nous disposons de quatre stations, une pour la CW, une pour la SSB, une pour le digimode et une quatrième qui est mixte, qui peut fonctionner en fonction de ce qui marche, sur un quelconque mode. Tous les coaxiaux des antennes arrivent au shack sur une platine. C’est sur cette platine que nous connectons le coaxial de l’émetteur. Nous disposons de filtres que nous devons changer en fonction de la bande sur laquelle nous travaillons afin de perturber au minimum les autres. Ces filtres sont efficaces, mais malgré tout, parfois sur certaines fréquences et en fonction des harmoniques nous entendons dans nos casques la station d’à côté trafiquer.
Une partie des antennes
Nous commençons le trafic en début de soirée en opérant comme prévu en CW, SSB et RTTY. Après avoir lancé quelques appels, les premiers QSO sont logués et rapidement le rythme s’accélère. Les piles-up s’intensifient sur les trois bandes. Les OM du monde entier sont au rendez-vous. Pendant qu’une équipe opère, les autres vont diner au restaurant du club et le relais est pris pour permettre aux trois premiers opérateurs de diner. Jean-Luc a préparé les plannings. Nous effectuons chacun trois heures de vacation radio puis nous avons six heures de repos. La nuit les vacations sont de quatre heures.
Nous rencontrons des difficultés à trafiquer sur le 160m. Malgré trois changements d’antennes de réception, nous avons un QRM très élevé. Le 160m nous a ‘déçu’ car difficile de faire de nombreux contacts comme en Côte d’Ivoire l’année précédente. Les ouvertures sur 10 et 12m sont courtes vers midi et début d’après midi local.
Nous profitons de nos six heures d’arrêt pour nous reposer mais aussi pour découvrir notre environnement. Nous visitons ainsi la mangrove, la longue plage où des petits villages faits de cabanes en branche, sont installés. Nous suivons la piste sablonneuse pour découvrir un beau paysage avec des palmiers à perte de vue. Nous visitons aussi pour certains, la ville de Ouidah qui se situe à une dizaine de kilomètres. Nous nous y rendons grâce aux employés de l’hôtel qui nous y transportent avec leur mobylette, sur les chemins de sables. Ouidah est malheureusement connu comme étant la plus grande ville africaine de départ des esclaves vers l’Amérique. Nous nous arrêterons tous devant le monument érigé en leur mémoire.
Le monument érigé en la mémoire des esclaves
La ville de Ouidah est africaine. Elle est pleine de couleur et d’odeur notamment près du marché. On y ressent une énergie particulière. Les gens que nous rencontrons sont très sympathiques.
Notre campement est exceptionnel avec trois belles piscines au bord de la plage qui sont bordées de palmier. Seul hic, nous ne pourrons pas nous baigner dans la mer car celle-ci, du fait d’un fort vent continu, est dangereuse. Mais la carte postale est belle. Le restaurant en bord de mer, est une belle construction faite d’un haut toit immense en bois et paille, sans mur. Les repas servis sont d’ailleurs excellents. Les soirées que nous y passons à échanger nos anecdotes, après une savoureuse collation, une bonne bière La Béninoise à la main, avec un vent qui nous fait oublier la chaleur de la journée, sont très agréables.
La plage vue du restaurant
Un peu de réconfort avant le pile-up
Mais revenons à TY7C. En journée, le trafic est fluide, les QSO s’enchainent sans difficulté. Le gros des contacts, c’est les Amériques, l’Europe et le Japon. Les trois modes de trafic sont activés en permanence. La station DIGI utilise les modes PSK, RTTY et FT8. Effectivement TY7C a été l’une des toutes premières expéditions à utiliser le mode FT8. Le tout nouveau logiciel permettant un trafic « expédition » n’est pas tout à fait stable et nous aurons quelques petits déboires avec celui-ci d’autant plus que les PC ne seront pas très bien synchronisés au départ du fait d’un internet instable. Mais cela nous a permis tout de même de trafiquer par exemple le soir, sur des bandes fermées à la CW et à la SSB. Cela nous a aussi servi d’alerte, car lorsque nous voyons que cela répond nous pouvons changer de mode et revenir aux modes CW ou SSB.
Le shack de TY7C
Jean Luc, Philipp, Damien se relaient à la station SSB. Arno, Raymond et Henri s’occupent des stations digimodes. Andreas, Jo, Christian et moi-même, nous nous occupons de la station CW. En fait chacun d’entre nous essayons aussi les autres modes. Malgré une propagation pas très avantageuse, les QSO s’enchainent facilement la journée. C’est vrai par contre que la nuit, nous avons des périodes importantes de creux avec seulement quelques dizaines de QSO à l’heure. Nous avons aussi fréquemment des coupures électriques. Des groupes électrogènes prennent le relais mais malheureusement, ils n’empêchent pas l’arrêt total de nos stations. Nous devons patienter à chaque fois de longues minutes afin que nos amplificateurs chauffent de nouveau.
Au rythme ininterrompu des vacations, le temps passe vite, notre semaine africaine arrive à son terme.
Nous consacrons notre dernière journée, notre avion décollant tard le soir, au démontage et emballage de tout le matériel. Quelques derniers QSO sont réalisés, le tout dernier se fait sans le vouloir, avec un membre de F6KOP. Dans l’après midi, nous buvons une dernière Béninoise au splendide bar de l’hôtel, en bord de mer, avec son directeur et Nicolas TY2AC qui est venu nous saluer avant notre départ. Nous chargeons ensuite nos bagages sur le toit d’un mini bus. Celui-ci sur la route de l’aéroport tombe en panne. Après quelques litres d’eau déversés dans le radiateur bouillant et un peu de patience, celui-ci repart comme si de rien n’était.
Chargement des bagages – Départ vers l’aéroport
Après un nouveau vol de nuit, nous arrivons au petit matin à Charles de Gaulle. Il fait très froid pour nous. Franck F4AJQ et Bruno F5AGB nous y attendent.
Nous tenons à remercier Franck F4AJQ pour la gestion et l’organisation de l’expédition. Il n’a malheureusement pas pu y participer. Merci aussi au QSL manager F5GSJ d’avoir accepté cette mission difficile.
Ce fut encore une fois une belle réussite pour le Radioclub F6KOP.
La piste menant à l’aéroport
Une partie de l’équipe TY7C s’est retrouvé à Friedrichshafen au mois de juin.
De gauche à droite : TY2AC Nicolas, F5NTZ Xavier, DJ3CQ JO, F5MFV Raymond, OE7PGI Philipp, F4AZF Damien, F1HRE Henri, F1ULQ Jean-Luc, DL3GA Andreas, DL2MDU Christian, DL1CW Arno
Nous tenons à remercier tous nos sponsors et nos soutiens et notamment :
L’Union Française des Télégraphistes
Le Réseau des Emetteurs Français
ARSM – L’Association des Radioamateurs de Seine et Marne
Le Clipperton DX Club
Le Mediterraneo DX Club
Le Lynx DX Group
DX avenue – Antennes DXBeam
Win-Test
Batima
Acom
Spiderbeam
ADM
KWcom.BE
LBS – Low Band Systems
Radiosport
Wimo
Clublog
Tokyo 610 DX Group
L’expédition TY7C et le mode FT8
Jean-Luc F1ULQ
TY7C a été la première expédition à utiliser le mode FT8 avec l’option ‘expédition’. Nous voulons par ces quelques lignes, expliquer pourquoi nous avons choisi de l’utiliser mais nullement nous justifier.
Le mode FT8 a été développé par Joe K1JT il y a environ 1an. Ce mode cousin du JT65 et du WSPR permet de faire des échanges plus rapidement, par séquences de 15 secondes. Il est plébiscité par de nombreux OM et la demande est grande. Conscients que la propagation est dans un creux, même si le minimum reste encore à atteindre, nous avons estimé que ce mode permettant des contacts avec de faibles signaux pouvait nous apporter un plus. Nous avons utilisé ce mode principalement sur les bandes hautes (10 et 12m) afin de déceler la montée de propagation avant de passer en télégraphie puis phonie lorsque les signaux étaient devenus confortables. Nous avons utilisé la même méthode sur 160m, sachant que le bruit était très élevé et pu constater que des signaux étaient exploitables bien avant la Grey Line.
Nous avons été les premiers à utiliser l’option ‘expédition’ avec Fox et Hound (nous étions Fox). Certains n’ont pas compris la raison de ce choix. K1JT nous avait également mis en garde, l’option expédition était encore en phase de test. Mais nous avons tout de même fait le choix d’expérimenter ce mode.
Un des avantages de l’option expédition est que c’est le logiciel que gère le split, cela a évité que nos correspondants ne répondent là où nous appelions, et ne nous brouillent, comme nous avions déjà pu le constater pour d’autres DX avant de partir. Certains ont été déçus car ils avaient lu qu’il était possible de faire jusqu’à 500 QSO par heure. Cette fonctionnalité ne nous était pas disponible car non activée dans le logiciel.
En conclusion, nous avons été heureux de pouvoir utiliser ce mode, même si de nombreux bugs étaient encore présents. Cela a permis à de nombreuses personnes de nous contacter malgré des conditions de propagation difficile.