Le projet d’expédition à St Brandon a vu le jour en mai 2022 alors que Sylvia OM4AYL et moi même étions en vacances à l’Ile Maurice. J’essayais d’obtenir une licence 3B8 pour opérer pendant mes vacances que je n’ai malheureusement pas obtenu car je m’y suis pris trop tard. Je n’avais donc rien d’autre à faire que de profiter des vacances. A cette époque-la, j’avais déjà pris quelques renseignements et rendez-vous à Port Louis pour une éventuelle expédition à Saint Brandon . Saint Brandon était classé, à l’époque, 54ème most wanted DXCC.
Beaucoup de choses devaient être organisées: licence, la logistique, le transport, les autorisations d’accès mais surtout la constitution d’une équipe. L’idée de départ était de faire une expédition tchéco-slovaque avec un maximum de six personnes en raison de la capacité. J’ai donc demandé à David OK6DJ et à quelques personnes du CDXP car ils ont une grande expérience d’organisation d’expéditions. Le problème était que même eux n’avaient jamais participé à une telle expédition, il s’agissait là d’une île déserte au milieu de l’Océan Indien sans eau, sans nourriture, sans électricité ni Internet, etc…
Il était nécessaire d’avoir un contact à Maurice pour nous aider. C’est Mathieu de la société Raphael Fishing qui nous a aidé à obtenir tous les autorisations nécessaires et qui nous a aidé organiser notre séjour. Il fallait organiser le transport, trouver les groupes électrogènes, les câbles électriques, la nourriture, les boissons, le carburant, et surtout la licence qui n’était pas facile à obtenir. Nous l’avons obtenu après plusieurs échanges courant octobre.
Comme nous étions encore en période de pandémie, il y avait une menace que nous soyons confinés une semaine, notre projet aurait ainsi échoué. Entre-temps, des négociations se poursuivaient entre Mathieu et le ministère pour annuler la quarantaine obligatoire. Heureusement, après de nombreuses réunions, ils ont annulé la mise en quarantaine et notre objectif s’approchait vraiment. L’équipe s’est progressivement formée et a été officiellement annoncée en décembre: OK2ZA, OK6DJ, OM3PC, OM4AYL, OM4MM, OM4MW, OM5RW et OM5ZW. Les amis tchecs du CDXP étaient en attente de partir pour l’expédition TN8K au Congo et la partie slovaque de l’équipe commençaient a préparer le matériel pour 3B7M.
La connexion Internet par satellite a été l’alpha oméga de notre expédition. Heureusement, j’ai réussi à contacter la société slovaque WRX qui nous a aidé pour lea connexion internet par satellite ainsi que pour les émetteurs satellites. Nous étions limités par le volume limité de données mais cela devrait suffire à mettre à jour les logs en ligne et envoyer quelques photos.
Nous attendions encore les autorisations de l’OIDC (Outer Island Development Corporation) pour accéder à l’ile. C’était la boulot de notre contact, Mathieu, qui nous tenait quotidiennement au courant de l’avancée … Il ne nous restait que 10 jours avant notre départ. Heureusement, les document ont été traités et les autorisations délivrées à temps. Cependant, nous ne savions pas ce qui se passait au même moment dans cette région de l’Océan Indien. La saison estivale est considérée comme la saison des cyclones et un énorme était en train de traverse la région… Nous avons surveillé le cyclone Freddie avec anxiété et les prévisions n’étaient pas bonnes. Le cyclone était censé passer la veille de notre arrivée, quelque part entre 3B8 et 3B7.A ce moment-là, nous savions que nous allions avoir un problème. Entre-temps, Mathieu m’avait annoncé qu’à cause du cyclone ils devaient évacuer les gens qui se trouvaient sur l’Ile du Sud de Saint-Brandon pour les transférer vers l’île du Nord à environ 50 km.
Le 21 février, nous sommes partis pour l’aéroport de Vienne. Les membres de l’équipe, tchecs et slovaques, nous sommes retrouvés à l’aéroport . Sur place, Austrian Airlines nous a facturé des surplus de bagages surdimensionnés… la journée commence mal. Le matin, nous atterrissons à Port Louis. Mathieu et ses compagnons nous attendent avec impatience avec deux gros taxis. Nous allons dans son entreprise, où nous stockons nos affaires puis allons dans les magasins du quartier pour faire quelques courses. Le ravitaillement alimentaire est déjà sur place mais nous devions encore acheter quelques fournitures. Nous nous adaptons au mode de vie local et nous attendons 1h30 pour manger. Tout va, en quelque sorte, plus lentement… même notre rythme et nos pensées deviennent plus lents. En attendant, Mathieu s’est occupé de trouver des groupes électrogènes et nous nous retrouvons de nouveau dans leur entreprise. Nous chargeons l’essentiel du matériel à bord la veille de notre départ pour St Brandon . Le soir, nous avons réservé un hôtel à Chinatown, pour certains membres c’était un hotel basique sans confort, mais ils ne savaient pas encore ce qui nous attendait à St Brandon …
Après 6 heures d’attente au port, les autorités ne nous a toujours pas délivré les autorisations de naviguer. Si nous voulons émettre depuis 3B7 pendant au moins 9 jours, et en supposant que nous obtenions l’autorisation le lendemain, il n’y a rien d’autre a faire à faire que de réserver de nouveaux billets pour le vol retour. Cela représente un surcout considérable, mais malheureusement, le train est déjà en marche. Après 6 heures d’attente inutile au port, nous retournons à l’hôtel sans le fameux sésame. Nous nous nous rendons en ville pour découvrir la vie locale. Nous en avons assez pour aujourd’hui et le plus dur du voyage nous attend : le bateau.
Le matin, nous retournons au port où cette fois nous sommes accueillis par des visages souriants. Je suppose donc que nous avons obtenu l’autorisation de naviguer. Le cyclone se dirige maintenant vers le sud et n’est plus menaçant. Eh bien, nous avons enfin le feu vert et il semble que nous mettions les voiles aujourd’hui même. Le 24 février à 10h30 notre départ pour St Brandon est imminent. Cependant, nous devons faire le plein des réservoirs pendant 1h30, car les bateaux qui mouillent dans le port doivent avoir des réservoirs vides.
Le plaisir commence réellement une heure plus tard après avoir quitté le port. Nous arrivons en pleine mer et les nourrissages de poissons s’enchainent… Certains membres de l’équipe ont réussi à prendre des cachets contre le mal de mer appelées kinedryl et ils sont maintenant en mode sommeil. Personne ne veut aller en cabine car tout le monde a la nausée. Il est préférable d’observer la surface de l’océan pour éviter d’être trop malade. OM5RW est le meilleur d’entre nous en tant qu’ancien marin et il a le sourire aux lèvres.
Nous naviguons à 8-10 nœuds à l’heure, mais nous sommes très lourds donc le voyage s’éternise. De plus, nous devons nous rendre sur l’île du nord pour récupérer l’équipage évacué à cause du cyclone, ce qui prolongera notre voyage d’au moins 6 heures supplémentaires. Nous essayons de dormir mais c’est une torture. Les comprimés kinedryl nous sauvent. Après 29 heures de navigation, nous arrivons enfin à l’île du Nord dans l’obscurité et embarquons l’équipage évacué avec la chaloupe. Après l’embarquement, nous nous dirigeons vers l’île du sud et arrivons à destination vers minuit heure locale. Le problème est de trouver, dans l’obscurité, la bouée pour s’arrimer. La nuit, le débarquement est périlleux. Nous ne prenons que l’essentiel et un minimum de matériel ( 1 TRX, 1 ampli et une antenne 30m) pour commencer à trafiquer cette nuit là.
Après notre débarquement nous sommes horrifiés. Le cyclone Freddie a laissé des séquelles de son passage. Les chambres étaient pleines de sable et de détritus. Ruda et David construisent une antenne pour 30 m. Nous déballons le matériel et commençons à trafiquer. Le premier QSO sur 30m fut DM4AO. Le matin, nous alternons avec OM4MW et avons environ 800 QSO en CW dans le log. Le matin, nous commençons à assembler les antennes. 1 Spiderbeam, 2 VDA (10 et 12m), 1 Verticale pour 40 et 80m. Il fait très chaud et humide sur l’île. Quelques membres de l’équipe n’ont pas utilisé de crème solaire et après 2 heures ont souffert de gros coups de soleil. En parallèle, nous continuons le trafic sur les bandes hautes 10 et 12m. Les splits en SSB sont larges, 50 kHz et 20 kHz en CW. Les Conditions sont très bonnes sur les bandes hautes et nous favorisons principalement les bandes 10 et 12m où pour la plupart des stations nous sommes un new-one.
Nous avons 4 stations qui fonctionnent simultanément et essayons de trafiquer principalement en CW et SSB. En même temps, nous installons un TS480HX pour le trafic en FT8. Les bandes hautes sont ouvertes jusqu’à 2h heure locale soit environ 8 heures après le coucher du soleil. Nous essayons de donner des QSO au plus grand nombre de stations possible tout en donnant la priorité aux américains pour qui 3B7 est très recherché. En SSB, nous avons Ruda OK2ZA, Sylvia OM4AYL et Martin OM4MM. La CW est principalement opérée par Joe OM4MW, Rudy OM3PC, David OK6DJ, Miro OM5RW et Lubo OM5ZW.
Après le premier jour, le groupe électrogène que Raphael Fishing utilise pour alimenter le bâtiment est soudainement tombé en panne. Le problème n’était probablement pas dans le tableau mais dans le câble d’alimentation 3x 1,5mm² Heureusement, nous avions de gros câbles d’alimentation de rechange ainsi que deux groupes Honda de secours que nous avions loué à Maurice . L’un était un 6,5 KVA et l’autre un 3 KVA . Nous avons également apporté environ 700 litres d’essence et 700 litres de gazoil sur l’île. Nous avions anticipé ce scénario et tout prévu car sans électricité nuos ne pouvions rien faire.
Le lendemain, nous commençons à construire d’autres d’antennes : 2 Spiderbeam , 1 Verticale pour 160 m et les antennes de réception Beverage et EWE .
La traversée de l’île ressemble littéralement à un film d’Hitchcock, avec des oiseaux qui se précipitent sur vous pour défendre leurs nids. La nuit, nous commençons à opérer sur 160m et nous rendons compte qu’avec la réception sur l’île ce ne sera pas si facile. Les Beverage fonctionnent mal car il n’y a pas de bonne terre sur l’Ile. De plus, les interférences des groupes électrogènes nous causent beaucoup de problèmes. Miro OM5RW a construit l’antenne EWE mais qui ne donne pas de résultats satisfaisants. Néanmoins, nous faisons quelques QSOs.
La cuisine est simple et devient encore plus simple avec le temps. OM4MW commence à avoir une faim de loup, et le mot poisson ressemble plus à un juron qu’à de la nourriture pour certains membres de l’expédition. Certains membres apprécient bien le poisson et au vu de la quantité de homard frais, cela ressemble plus à un déjeuner dominical pour eux. Le petit déjeuner est composé de pain grillé avec du beurre de cacahuète et de la confiture. Heureusement, nous avions prévu beaucoup de bière et donc le pain grillé et la bière est aussi une bonne combinaison pour le petit déjeuner.
Petit à petit, nous ressentons la fatigue nous gagner. Il est temps de se détendre un peu alors Sysa, Lubo et David acceptent l’offre de Mathieu pour une sortie de pêche en mer. Les locaux nous font visiter les îles voisines de l’archipel et nous emmènent pêcher. David OK6DJ attrape une belle prise et le dîner est assuré. De plus, nous nageons dans une belle eau de l’océan Indien sans la foule ni plages bondées de touristes. Après un périple de 3 heures en plein soleil, nous rentrons complètement épuisés, il est donc nécessaire de dormir pour récupérer. Pendant ce temps, le reste de l’équipe maintient les pile-ups. Rudo OM3PC et Jozo OM4MW effectuent un trafic remarquable.
Nous avons environ 80000 QSOs dans le log et il nous reste encore 4 jours avant la fin de l’expédition. Nous savons avec certitude qu’à ce rythme et sauf imprévu nous allions atteindre les 100000 contacts . Cependant, au fil des jours suivants, nous avons eu des orages de plus en plus fréquents qui nous ont causé pas mal de problèmes. Après une tempête, une Spiderbeam et la verticale 80 m sont déruits. La nuit, il était presque impossible de trafiquer en raison du fort QRN.
Nous atteignons la cap magique des 100000 QSOs et il nous reste à peine plus de 2 jours avant la fin de l’expédition. Doucement nous commençons a démonter les antennes bandes basses et les antennes RX puis petit à petit tout le reste. Il y a beaucoup à faire, donc pendant qu’un groupe trafique, l’autre range les antennes, les câbles, etc. Le matin de notre départ, nous emballons la dernière station et David OK6DJ fait le dernier QSO.
Le bateau ALBATROS est prêt à partir et nous transportons donc progressivement tout le matériel à l’aide de petites embarcations. Nous terminons notre expédition avec 123000 contacts dans le log. Un long voyage en bateau vers l’île Maurice nous attend. A cause de la fatigue, la plupart d’entre nous dormirons tout le trajet. Le bateau est chargé de poissons mais nous rêvons d’hamburger-frites ou de pizza. Après 24 heures de navigation , nous arrivons à Port Louis et Raphael Fishing nous a prévu le transfert jusqu’à notre hôtel près de l’aéroport. Enfin, nous avons profité d’une douche normale, d’une bonne bière pression et d’un diner tous ensemble . Le lendemain, nous avons notre vol retour pour l’Europe
Merci aux gars du CDXP (Czech DXPedition) pour leur aide et nous espérons que ce n’était pas la dernière expédition conjointe CDXP – OM7M. En tout cas, malgré tous les problèmes rencontrés, nous estimons que notre expédition a été un succès et nous sommes heureux d’avoir rendu possible le contact à 25000 stations.
Merci à toutes les stations OK/OM pour leur appel ainsi qu’aux nombreux sponsors listés sur notre site www.3b7m.com